A Essarts-En-Bocage (85), dans la ville de L’Oie, cela fait 85 ans que la Maison Ernest Soulard est spécialiste du canard et producteur de foie gras. A l’approche des fêtes de fin d’année, nous sommes allés à la rencontre de Magali Panau-Soulard, Présidente Directrice Générale de la société qui porte son nom depuis déjà 3 générations.

Magali et Joel OK

Magali Panau-Soulard avec son père Joël Soulard

Tout commence dans la maison familiale, située non loin du site actuel. Ernest Soulard, ouvrier agricole, sillonne les marchés environnants et achète ses premiers canards. Constance, sa femme, les vide et les plume puis ils les vendent au marché de Rungis. « C’est de cette manière qu’est née la société en 1936 ». Rapidement, toute la famille, enfants compris, mettent la main à la pâte. « Mon père, Joël Soulard , était le petit dernier d’une fratrie de 8 enfants. » Passionné par cette filière, c’est lui qui prit les rênes de la société en 1972 avec l’ambition de développer l’œuvre familiale. Deux ans plus tard, avec l’aide de ses frères et sœurs, il fonde le premier abattoir sur le site de L’Oie. Mais très vite, Joël Soulard voit plus loin. « Il a été très visionnaire, et décida d’élargir notre métier avec toute une partie sur le développement en amont. ». L’entreprise commence alors à travailler avec des éleveurs de canards en direct, puis investit dans un couvoir en 1990, lui permettant de maîtriser la reproduction des canards ainsi que l’élevage. Pour continuer dans cette démarche d’intégration des activités, la société construit même sa propre usine d’aliments. Grâce à toutes ces diversifications, l’entreprise Ernest Soulard est en mesure de suivre tous les maillons de sa filière, de l’œuf à l’assiette. Un réel avantage pour remonter rapidement jusqu’à la source. « La force de l’entreprise résulte de cette diversification des activités ».

Depuis ces prémices, la société a beaucoup évolué. Le savoir-faire Soulard s’exporte bien au-delà de nos frontières, dans 36 pays précisément. Elle emploie actuellement 500 personnes et s’étend sur 20 000 m². En tant que spécialiste du canard, Ernest Soulard se concentre sur l’élevage de deux espèces : le canard de Barbarie et le canard Mulard. Le premier, aussi appelé canard maigre, est élevé pour sa viande, très appréciée à l’export, dans les pays européens comme l’Allemagne et le Danemark. Il occupe une place importante dans l’histoire de la maison Soulard, « c’est notre tout premier produit ». Puis, dans les années 90, le marché du foie gras connait un essor « les clients ont commencé à demander du foie gras et du magret de canard ». Ces morceaux étant issus d’un canard Mulard, Ernest Soulard s’est donc lancé dans la production de canards gras. Issu d’un croisement entre un canard Pékin et un canard de Barbarie, le canard Mulard a la particularité de développer son jabot, ce qui favorise la croissance de son foie pour l’engraissement. Aujourd’hui, le canard Mulard, privilégié pendant la période des fêtes de fin d’année, représente 30% de la production globale de l’entreprise contre 70% pour le canard de Barbarie.

Ernest Soulard 26 s scaled e1684327004869 Forte de son ancrage territorial, l’entreprise travaille avec environ 250 éleveurs, tous basés à moins de 80 kilomètres du site de production. Cette proximité comporte de nombreux avantages. « Une fois par semaine, les canetons sont livrés dans les fermes via notre flotte de camions ». Ernest Soulard effectue également la livraison de l’alimentation dans les élevages. Puis, lorsqu’ils repartent des fermes, les camions sont chargés des matières premières pour l’usine d’aliments. Ou lorsque le processus d’élevage est terminé, avec les canards. « L’organisation est minutieuse. Tous les trajets sont optimisés pour réduire notre empreinte carbone ». Il faut compter 12 semaines en élevage pour que les canards soient prêts. A ce terme, ils sont directement envoyés à l’abattoir.

La gamme de produits Ernest Soulard recense environ 1000 références reparties en 4 grandes familles : le canard gras ou maigre, la découpe primaire (filet, cuisses), la découpe secondaire (émincé, tournedos…) et enfin le foie gras cru et cuit. Plus récemment, le lancement d’une gamme Bio en 2019 est venu enrichir l’offre de produits. « Pour garder notre indépendance, il faut se développer dans des marchés de niches. Nous avons accompagné de jeunes agriculteurs qui souhaitaient se lancer dans le bio. Actuellement, nous sommes capables de produire 2000 canards Bio par semaine ». Sur le marché du canard à foie gras, Ernest Soulard représente seulement 4% du marché français, tandis que sur celui du canard maigre, il se positionne en tant que troisième acteur national. « Nous ne cherchons pas à produire du volume, mais plutôt à fabriquer un produit gourmand et qualitatif. Pour bien faire, il faut être strict à toutes les étapes. C’est pour cette raison que l’on a voulu maîtriser toutes les étapes de notre chaîne de production ».

Exterieur 2 ok scaled

Depuis 20 ans, la société détient la certification International Food Standard (IFS), garantissant la sécurité, la qualité des produits alimentaires et les processus de production. « Nous sommes conscients que les conditions d’élevage et l’alimentation influent sur la qualité du produit final ». Elle s’est également engagée aux côtés des professionnels du foie gras à respecter la charte Palmi G Confiance, assurant l’application des bonnes pratiques en matière de bien-être animal dans les élevages. « Pour plus d’impartialité, nous sommes audités régulièrement par des organismes extérieurs ».

Soucieuse des enjeux environnementaux, l’entreprise recherche en permanence à valoriser ses déchets. Par exemple, toutes les plumes de canard sont recyclées dans une filiale. Là-bas, elles sont lavées, triées et utilisées dans la confection de textile, literie etc. « Chez nous, il n’y a pas de perte. Nous valorisons l’intégralité de nos canards ». Si bien que depuis 2017, Ernest Soulard s’est doté de sa propre unité de méthanisation, permettant de transformer ses déchets en gaz biologique.

En 2020, un nouveau site de 8 000m² baptisé « La Cuisine de Constance » , en référence au nom de la grand-mère Soulard, est venu agrandir la société. « Le bâtiment à côté du nôtre était en vente. C’était l’occasion de rapprocher nos activités. » Ces ateliers, dédiés à l’élaboration des foies gras cuits et confits de canards, ont permis à l’entreprise d’accroître ses capacités de cuisson et d’investir dans des outils de production plus modernes.

Après plus de 85 ans de développement, l’entreprise souhaite poursuivre son aventure passionnée en faisant perdurer la transmission entre les éleveurs de canards. A l’avenir, elle devra faire face à des enjeux de recrutement « Toute la génération des baby-boomers part progressivement à la retraite. Nous souhaitons trouver des candidats, avec qui nous partageons les mêmes valeurs ». Enfin, pour faire face à l’évolution des modes de consommation, les équipes travaillent constamment sur le développement de nouveaux produits. Une chose est sûre, Ernest Soulard restera 100% canard.